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mardi 24 avril 2007

Le boulevard social-démocrate

Le centre sera absent du second tour de l'élection présidentielle. Mais, paradoxalement, l'élimination de François Bayrou offre, à compter d'aujourd'hui, un bouolevard à la sociale-démocratie. Un boulevard qui peut mener la gauche à la victoire, le Parti socialiste à la rénovation, et une équipe moderne à l'Elysée. Un boulevard qu'il n'appartient qu'à elle d'empreinter résolument.

Quelle est la situation, ce matin ? Le candidat de l'UMP a réussi son pari : à plus de 31 % des voix, il explose la base électorale de Jacques Chirac, et réincorpore dans le jeu républicain une partie des électeurs Le Pen. Il capte une grande partie de l'électorat ouvrier. Il est fort là où le sentiment de relégation est important (anciennes zones industrielles, monde rural en voie de désertification, etc.), là où les gens sont plutôt vieux (le sud de la France), là où ils sont plutôt (très) riches (ouest parisien, banlieue pavillonnaire). Mais pour réussi ce pari, Nicolas Sarkozy a brûlé ses vaisseaux. En droitisant son discours, il s'est aliéné une partie de l'électorat de la sphère d'influence de la droite libérale et du centre démocrate-chrétien. Ces électeurs peuvent lui manquer : rien ne dit qu'ils pardonneront à NS ses algarades sur le terrain sécuritaire, sa brutalité, son mépris des corps intermédiaires, sa suspicion envers l'appareil judiciaire, son peu de cas des droits de la défense, bref : tout ce qu'un vrai libéral ne saurait tolérer.

L'électorat de François Bayrou apparaît composé de plusieurs strates. D'une part, le fond démocrate-chrétien, les héritiers de Lecanuet, de Barre, dans une moindre mesure de VGE et Balladur. Ceux-ci ont un tropisme davantage tourné vers la droite. Si la logique du vote est majoritaire, ils iront vers l'UMP. Mais pas tous. Outre ceux qui ont été séduits par la dimension anti-système du candidat (pas tant que ça selon moi, voir notamment l'interview de Pascal Perrineau sur le Monde selon lequel la géographie du vote Bayrou met en lumière de grandes permanence avec le vote démocrate-chrétien des années 1950 aux 70s), beaucoup viennent de la gauche. Déçus par le retard idéologique du parti socialiste, qui peine selon eux à prendre acte de la chute du mur de Berlin, de la défaite du marxisme, de la mondialisation, etc., leur vote a pour ambition de peser sur le logiciel socialiste. Ces électeurs, lassés que l'extrême gauche occupe sur le terrain doctrinal un poids inversement proportionnel à sa crédibilité en tant que force de gouvernement ou même son poids électoral, fatigués d'être taxés de sociaux-traitres s'ils émettent une proposition économiquement raisonnable, ont trouvé dans Bayrou un moyen de pression. Ils ont gagné : aujourd'hui, ils constituent la vraie réserve de voix qu'il convient pour Ségolène Royal de conquérir.

Car si Ségolène Royal a fait un bon score, celui-ci n'est pas révolutionnaire : elle est forte là où la gauche est historiquement implantée, comme dans le Limousin et le Midi-Pyrénées, terres historiques d'implantation radicale puis socialiste. Alors que Nicolas Sarkozy a, lui, déjà dépassé les bases strictes des chasses gardées de la droite. On compare le score de SR à celui de François Mitterrand. Ce serait oublier que celui-ci disposait d'une réserve de 15 % à sa gauche. Autres temps, autres mœurs : c'est maintenant au centre qu'ils se trouvent.

Ainsi, Ségolène Royal doit faire un geste fort vers le centre, ne serait-ce que pour des raisons tactiques : le TSS (tout sauf Sarkozy) pourra fédérer l'extrême gauche et les plus à gauche de l'électorat de François Bayrou, mais cela ne sera pas suffisant pour gagner. Et même si ça l'était, pour quelle victoire ? Une alliance conjoncturelle de rejet ne donne pas de mandat pour gouverner, Jacques Chirac est bien placé pour le savoir, lui qui transforma ses 82 % en quinquennat de la déception. Non, définitivement, une victoire d'adhésion est plus souhaitable que jamais.

Pour des raisons idéologiques, enfin, une recomposition à gauche est souhaitable. Le PS, faute d'avoir opéré dans son discours les corrections nécessaires à une mise en adéquation de celui-ci avec sa pratique gouvernementale, vit dans une schizophrénie permanente. L'ambition et le remords, pour reprendre l'ouvrage magistral d'Alain Bergounioux et Gérard Grunberg. Difficile, dans ces conditions, de gouverner sereinement : la peur de trahir prédomine. Corollaire : le socialisme français a perdu beaucoup de son influence en Europe, s'il en a jamais eu. Et quand il s'agit de réécrire la directive Bolkestein (qui, pour le coup, est un texte majeur du point de vue économique), c'est le SPD qui s'y colle, le PS français, inaudible, assistant en spectateur. Influence 0, donc. Cette situation n'est pas insurmontable.

Pour toutes ces raisons, je pense que la sociale-démocratie bénéficie aujourd'hui d'un boulevard sans précédent en France. Dominique Strauss-Kahn aurait probablement été à même de transformer l'essai. Ségolène Royal le peut également, sans forcément y même la même intensité idéologique. Elle devra pour cela vaincre les logiques d'appareil qui continuent de prédominer au Parti socialiste, ainsi que la culture bloc contre bloc héritée des années 70/80 et de l’ancienne influence du communisme. Les jours qui viennent diront si elle peut transformer l'essai. En réponse à un billet précédent, le socialisme de gouvernement sera social-démocrate ou ne sera pas.

mercredi 18 avril 2007

La grande incertitude

Dans quatre jours, nous devrons voter. L’élection est indécise. La campagne n’a pas – Dieu merci ! – tourné exclusivement autour du thème de l’insécurité ; au contraire, aucun thème ne s’est définitivement dégagé, tous ont été abordés, peu l’ont été en profondeur. Il semblerait que 4 candidats aient des chances d’accéder au second tour, dont 3 peuvent espérer la victoire finale. Ces différents choix pourraient constituer autant de lignes politiques. Je prétends au contraire que, quel que soit le président élu, il est très difficile de savoir selon quelle ligne politique le pays serait gouverné.

Nicolas Sarkozy : rupture libérale ou conservatisme ? La prise de pouvoir de NS au sein de l’UMP n’a pas été accompagné d’une refondation idéologique : le parti de la droite est d’abord une machine de guerre au service du candidat. Sans refondation idéologique, la question du libéralisme demeure taboue : le mot rupture a d’ailleurs progressivement disparu au profit d'un vocabulaire plus classique de droite. Et pourtant, des questions à trancher, la droite en avait. La principale est pour moi son rapport au libéralisme, rendu difficile par l’héritage gaullien (la droite ayant dû attendre 1986 pour se débarrasser de la base idéologique que représente le programme du Conseil National de la Résistance ayant présidé aux nationalisations de 1946) : l’hostilité au libéralisme est bien d’ailleurs l’un des rares points sur lequel on puisse faire crédit au président Chirac de constance !
Le rapport de la droite à l’Europe découle, me semble-t-il, grandement du point précédent (en y rajoutant l’idée de nation, mais celle-ci est également un avatar de la question libérale, la nation comme incarnation du groupe étant souvent opposée au libéralisme, décrié comme triomphe de l’individualisme). C’est ainsi que NS passe de la rupture (libérale, au moins en partie) aux discours de Henri Gaino… et quémande le soutien de Jacques Chirac (que celui-ci lui a « tout naturellement » apporté). Rendons ici hommage à René Rémond, décédé la semaine dernière : Nicolas Sarkozy est un parfait exemple de la cohabitation des trois droites : orléaniste car libéral, légitimiste car conservateur, bonapartiste car se prévalant d’une relation directe avec le peuple et récusant les pouvoirs intermédiaires, il est la synthèse des droites. Or celles-ci ne sont pas 100 % compatibles. La tendance qui l’emportera fera la ligne de la présidence Sarkozy. Les rénovateurs, à droite, voudront voir dans le Sarkozy de 2004 le « vrai » Sarkozy. Les gaullistes se réjouiront de ses marques d’adhésion au « modèle français » de ces derniers mois. Mais pour l’instant, on ne sait pas.

Ségolène Royal : sociale-démocratie ou première gauche ? Libéralisme régulé ou crypto-marxisme ? Les deux lignes étaient représentées lors de la primaire interne au PS, par DSK et Fabius. Oui, mais Ségo a gagné, et voilà le PS sans référence pour analyser sa candidate : précisément, Ségolène Royal n’appartient à aucune de ces deux lignes. Et comme pour Sarkozy, on en est réduit à aller chercher dans son passé pour savoir « ce qu’elle pense vraiment ». La référence à Mitterand est omniprésente ? Oui, mais elle cite également Jacques Delors. Elle veut augmenter le SMIC à 1500 € ? Oui, mais elle tient au PS le discours des entreprises qui innovent. Elle souhaite que nous arborions des drapeaux à la fenêtre le 14 juillet et a pris Chevènement dans son équipe ? Oui, mais elle est farouchement décentralisatrice et a voté oui au TCE. Difficile, donc, de se faire une idée en s’appuyant sur le clivage traditionnel du PS. Donc, bien évidemment, la question du rapport au libéralisme, qui est également celle qui empoisonne l’existence du PS, celle qui devrait être traitée si le PS voulait faire son Bad-Godesberg, celle enfin dont la résolution conditionne l’aggiornamento vers lequel les deux extrêmes du PS le tiraillent (la révolution anti-libérale contre la révolution sociale-démocrate), ne sera pas tranchée. Ségolène Royal c’est le refus du choix entre les deux gauches, entre Jaurès et Guesde, plutôt qu’une clarification. Une incarnation de la France plutôt qu’une ligne politique (la propagande ségoléniste joue cette carte à fond : Ségolène, c’est Marianne, c’est la république, c’est la France) – voir mon billet sur son intervention sur TF1 -, une ambiguïté permanente que n'a pas réussie à lever son discours de Villepinte (que j'avais commencé à analyser ici). S’il est certain que le débat politique ne doit pas se restreindre au clivage précédemment évoqué, il est certain que celui-ci existe : la présidence Ségolène

François Bayrou : démocratie chrétienne ou centre élargi ? La grande incertitude de la présidence Bayrou diffère des précédente en ce sens qu'elle ne concerne pas le choix entre deux lignes présentes dans son parti mais entre la ligne politique historique de la démocratie chrétienne et les possibilités de rassemblement que lui ouvrirait une victoire le 6 mai en-dehors de son parti. Cette différence tient à la nature même de l'UDF post-UMP : c'est un petit parti, mais idéologiquement plus homogène. Cela constitue sa force (il est plus cohérent que le PS et l'UMP) mais aussi sa faiblesse (réduit à l'expression de sa seule tendance, la démocratie chrétienne est un courant minoritaire).
Si François Bayrou venait à gagner, deux solutions seraient alors possibles : un regroupement de personalités de centre-droit et de centre-gauche dans une majorité soutenant son programme (un centre élargi regroupant gauche libérale [sociale-démocratie] et droite libérale [du type démocratie libérale]) dans lequel les véritables démocrates-chrétiens ne seraient pas forcément majoritaires, ou la restriction du courant politique dominant à la seule démocratie chrétienne. Il est probable que François Bayrou lui-même ne serait pas maître du destin de cette alternative, dont dépendrait pourtant la substance du quinquenat Bayrou.
***
Peu de clareté, donc, au moment de faire le choix. D'une part du fait du caractère composite des deux partis dominants, qui agrègent différentes sensibilités, d'autre part du fait de la nature même de l'élection présidentielle, qui organise le déplacement progressif de la campagne depuis le contenu des programme vers la personnalités des candidats. C'est l'un des grands désavantages du système : au delà du mythe de la "rencontre en un homme et un peuple", ses dérives avaient déjà été pointées par Mendès-France en son temps. Quelqu'un comme Rocard avoue dans ses entretiens ne l'avoir pas compris à l'époque. Depuis, il a changé d'avis.

dimanche 11 mars 2007

Le clivage droite-gauche face à François Bayrou

Ainsi, François Bayrou serait à égalité avec Ségolène Royal. Du moins, ce sont les sondages qui le mesurent, ce que les soutiens de la présidente de la région Poitou-Charrentes ont beau jeu de dénoncer après s'en être abondamment servi lors des primaires internes au PS. Ainsi, la « gauche » serait au niveau le plus bas depuis 1969, où elle n'atteint pas le second tour.

J'ai déjà eu l'occasion de discuter sur la toile, par exemple en réponse à un article de Jules sur Diner's room, de la signification du vote Bayrou. La tournure de la discussion était plutôt de reconnaître les effets positifs que pourrait entraîner l'accession du candidat centriste à l'Elysée, en ce sens qu'il introduirait des modifications institutionnelles capable de diversifier la présence à l'assemblée nationale, et serait à même de perturber la routine de l'alternance droite-gauche.

Perturber la structuration du débat politique autour du clivage droite gauche, c'est d'ailleurs ce que beaucoup, à gauche, tiennent pour hérésie. On a déjà dénoncé sur ce blog une façon particulièrement grossière de s'y prendre, celle de Jack Lang. Mais parlons du fond : brouiller le clivage droite-gauche, est-ce vraiment si mal ?

Pour des gens comme mon ami Sylvain, ou comme Laurent Fabius (qui n'est pas mon ami) : oui, sans hésiter. Sous-jacent : le clivage droite-gauche devrait irriguer notre vie politique car il correspond à une catégorie pérenne, immuable, du politique : si l'opposition n'est pas assez claire, assez frontale, la différence gauche-droite se brouille. Autrement dit, depuis toujours et jusqu'à la fin des temps, il n'y a que deux grandes forces politiques, et s'il existe des courants ou des nuances à l'intérieur de ceux-ci, les désaccords qui en résultent sont tenus pour secondaires comparé à l'antagonisme droite-gauche. Comme le remarque René Raymond dans son magistral Les droites en France, ceux qui imaginent des complications supplémentaires sont immédiatement "soupçonnés d'obéir à des arrières pensées politiques, de chercher à brouiller les cartes en dissimulant l'enjeu et la signification de la seule lutte qui compte : inutiles pour la compréhension de la politique, ces complications sont de surcroît nuisibles". On rejoint ainsi le thème, éculé mais toujours vivace, de la compromission : celui qui sort de la caverne du clivage droite-gauche est un traître, en tout cas pas un homme de gauche. Ainsi, une dénonciation de type Clémentine Autain ne fait que répéter ce que disait déjà Alain dans les années 20 : « lorsqu'on me demande si la coupure entre partis de droite et de gauche, entre hommes de droite et hommes de gauche, a encore un sens, la première idée qui me vient est que l'homme qui me pose cette question n'est certainement pas un homme de gauche ». On lui signalera que, depuis, il y a eu Raymond Aron, qui ouvre par cette citation son Opium des Intellectuels, mais je ne mettrais pas ma main au feu que Clémentine Autain en ait fait son livre de chevet...

Or s'il est chose certaine, c'est que le clivage droite-gauche est au contraire un produit historique, mouvant. Telles notions furent de gauche, et sont maintenant de droite ; et vice-versa. Certaines ont même cheminées, tout au long de notre histoire, entre les différents courants des droites et des gauches, sans vraiment se fixer. L'idée de nation, autre fois de gauche, puis de droite sous couvert d'autorité et d'ordre moral tandis que se développait une construction internationaliste du socialisme, puis de retour à gauche pendant l'entre deux guerre alors qu'une partie de la droite semblait subissait la trouble attraction des courants fascistes, de retour à droite avec De Gaulle, incarnée parallèlement avec un cocardisme très appuyé par le Parti communiste, etc. On pourrait faire pareil avec le libéralisme, la construction européenne, etc. Tout n'est donc pas si simple : s'il y a une droite et une gauche, elle ne sont pas immuables, et elle ne constituent pas forcément le clivage de référence.

Il y a donc une forme de facilité à se référer sans cesse à un clivage largement mythifié afin de résumer, de simplifier tout débat politique. Il y a même une forme de supercherie, qui confine à un comportement de type rentier : en s'exonérant du débat, une partie de la gauche escompte une rente électorale, celle des personnes se définissant comme de gauche. Car il est sûr qu'un homme de gauche aura du mal à voter pour une parti « de droite », ce qui équivaudrait à trahir son identité de gauche. Celle-ci se serait développée à travers une convergence, idéologiquement assez absurde pour qui a lu Marx, entre le clivage droite-gauche issu de la Révolution et celui sur lequel se base le marxisme.

René Raymond encore : « le ralliement du marxisme à la démocratie parlementaire a progressivement rendu possible une superposition puis une identification de l'opposition des forces sociales à celle des forces politiques: la lutte des classes s'est comme coulée dans le moule classique de l'opposition droite-gauche ». Cette magnifique manoeuvre politique, à mettre à l'actif de François Mitterand, a bien permi la création d'une rente électorale pour le Parti socialiste. Elle est utile pour l'accession au pouvoir. tant que le clivage droite-gauche est intériorisé par bon nombre d'électeurs. Or nous assiterions aujourd'hui à la fin de cette rente : en 2002, les classes populaires désertent le PS, qui est éliminé. En 2007, les très décriés bobos seraient sur le point de rejoindre Bayrou. Dans ce cas, à part chercher à préserver la rente en appelant à une opposition frontale, comme le fait Laurent Fabius, que le PS peut-il faire ?

On pourrait imaginer que l'émergence de Bayrou amène la gauche à dépasser ce clivage simplificateur. Et notamment, puisque Bayrou représente fondamentalement une tendance démocrate-chrétienne, libérale, européenne, cela pourrait – on peut rêver – forcer le PS à se positionner par rapport à la question du libéralisme. Car c'est bien le rapport entre socialisme et libéralisme, entre socialisme et ambition révolutionnaire, entre socialisme et économie de marché, qui est le grand tabou du PS, celui qui n'a été réglé ni à Dijon en 2003, ni au Mans en 2005. C'est celui qui a irrigué la division du PS au moment du référendum sur le TCE. C'est celui autour duquel sevrait s'articuler l'agiornamento qu'une partie du PS appelle de ses voeux. Une défaite de la gauche face à un centrisme décomplexé obligerait le PS à se poser ces questions, et il apparaîtrait que la candidature de DSK aurait eu plus de chance de fédérer, ce qui pourrait ouvrir la voie à une direction de type social-démocrate.

Ce scénario nécessite néanmoins un ingrédient qui me semble absent : il faudrait que Bayrou incarne véritablement ce centrisme libéral et européen, afin que les raisons d'une éventuelle défaite du PS soient immédiatement et indiscutablement identifiables. Or l'attrait pour le candidat centriste ne vient-il pas plutôt de son côté anti-système, de sa dénonciation (au demeurant fondée) des liens capitalistiques entre médais et groupes vivant de commandes publiques, d'un idylle largemenet mythifiée (le PS n'a pas le monopole des mythes !) avec les enseignants ? D'où l'analyse, souvent entendue dernièrement (), que Bayrou serait le candidat du statu quo, de la préservation des corporatismes, etc.

En d'autres termes, si Bayrou devait défintivement s'éloigner d'un libéralisme de type démocrate-chrétien pour ne plus incarner qu'un rejet de type poujadiste du système, elle y perdrait une grande part de sa force théorique. En ce sens, la proposition faite par FB pour les législatives ne prête guère à l'optimisme : une majorité présidentielle qui ne serait que l'agrégation hétéroclite de candidats Bayrou-compatibles, sans accord assumé autour d'un véritable corpus idéologique, ne constituerait qu'une alliance de circonstance, un nouveau Comité de Salut public. Une modification durable nécessite au contraire l'émergence de forces politiques assumées, stables, et idéologiquement cohérentes, débattant de leurs divergences devant la représentation nationale plutôt que dans les alcoves de leurs partis. Il est possible qu'une victoire de Bayrou amène ce type de recomposition.
Ce n'est pas probable...

mercredi 21 février 2007

Ségolène Royal sur TF1 : un nouveau type d'incarnation ?

Au-delà du format, sans doute impropre à stimuler une véritable réflexion politique, il me semble qu’il y a dans le passage de Ségolène Royal sur TF1 lundi dernier matière à réflexion quant au type de relation qu’instaurent les candidats avec leurs électeurs potentiels, et, au-delà, avec le peuple.
Le peuple ? Oui, le peuple : c’est bien lui qui semble avoir été mis en scène lundi, via cette adjonction hétéroclite de personnalités qui, chacune à leur tour, ont livré ce qui ressemblait davantage à des témoignages, fussent-ils poignants, qu’à de véritables interrogations susceptibles de placer la candidate dans une posture où elle aurait dû produire une analyse de la situation du pays et des moyens de l'améliorer. Face au peuple, Ségolène Royal : une guérisseuse, une mère... Bernadette Soubiroux ? Tant et si bien qu’on a pu faire référence au caractère thaumaturge de la guérison qu’elle semble avoir proposé à l’ensemble du corps social au travers de la personne d'un handicapé atteint de la sclérose en plaques (par exemple dans cet excellent billet sur Diner's room). Or faire référence au caractère thaumaturge, propriété des Rois, n’est pas innocent : le sous-jacent est que SR nous proposerait, au-delà du lien que crée l'élection entre l'ensemble des citoyens et leur plus haut représentant, une alliance transcendante d’essence royale (c’est le mot) entre le peuple et son souverain. Ce serait alors non pas le programme qui importe, mais le style de leadership que construit le candidat. Or fonder la relation politique sur une relation entre le peuple et l'homme plutôt que sur une analyse, c'est faire appel au mythe du « Grand homme » : le Grand homme, c'est celui qui, par sa personne et par l'adhésion qu'il emporte auprès du peuple, permet de réaliser les ajustements structurels que personne d'autre que lui n'aurait pu insuffler.

Est-ce nouveau ? Sûrement pas. La France aime les grands hommes, et ceux-ci le lui rendent bien, dans le succès ou l'échec. Voyons certains de ceux qui, bien qu’arrivés au pouvoir non par succession directe mais en raison des espoirs qu’ils avaient suscités chez leurs partisans, ont pu à la fois incarner et réussir un changement. Hugues Capet, désigné notamment pour la faiblesse de ses propres possessions, arrive au pouvoir soutenu par les grands du royaume après une élection pour n’être que leur primus inter pares ; il associe son fils au trône et crée ainsi l’un des rouages de la prospérité pluriséculaire des Capétiens [1]. Henri IV accède au trône presque par hasard ; il mène le pays sur la voie de la réconciliation religieuse. De Gaulle semble resurgir en 1958 comme général de pronunciamiento sur les pavois des ultras de l’Algérie française ; il dépose le bilan de la colonisation et poursuit la modernisation économique de la France. Même Mitterrand a réussi à sa façon : élu sur un programme pseudo-marxiste, il le désavoue (officieusement) 2 ans plus tard, ancre le PS comme parti de gouvernement apte à exercer la charge du pouvoir, et réalise avec l’Acte unique et Maastricht l’unité de l’Europe (sur une base libérale !). Tous ont fait acte de modernité, tous ont suscité au départ des attentes contradictoires sur la base desquelles ils ont accédé au pouvoir, aucun n’a annoncé son véritable dessein, tous l’ont mené au nom du lien qui les unissait à leur peuple, presque à l’insu de ce dernier.

Est-ce transposable ? Possible. Vous me direz, quel est ce grand dessein que le prochain président aurait à accomplir ? Eh bien, adapter les structures du pays aux mutations du capitalisme, prendre acte de ce que la concurrence fiscale, la croissance de la dette, la mondialisation, etc., restreignent les marges de manoeuvre de l'Etat mais également du fait que ce dernier a un rôle moteur à jouer dans l'adaptation du tissu productif du pays, dans sa spécialisation sur les marchés mondiaux... Pour un président de gauche, le défi serait double, puisqu'il faudrait aussi adapter le discours du parti dominant de la gauche à ces mêmes mutations dans l'objectif d'en faire une force de transformation crédible, ayant les bons outils intellectuels pour affronter la modernité. Or je tiens à mon analyse de la première partie du discours de Villepinte [2] : Ségolène semble posséder le bon diagnostic, et en a envoyé des signaux incontestables.

Et enfin, est-ce le cas ? Vous objecterez que Ségolène Royal a, au contraire, adopté une démarche inverse. Qu'elle a fait acte de modestie sur certains sujets, renonçant à se placer dans la posture je veux-je veux de son adversaire. Que les débats participatifs en sont l'illustration. Mais justement, je pense qu'il s'agit là de proposer une nouvelle forme d'incarnation, pas une analyse. Que les débats participatifs agissent en tant que cahiers de doléances, qu'ils permettent de passer du Roi de France à la Reine des Français (acquis de 1789 ?), je ne le conteste pas, mais justement, c'est davantage le type de relation, le type d'incarnation, qui est mis en valeur : voici le type de leader que je serai, faites-moi confiance, je vous mènerai sur les chemins bien fréquentés du progrès. C'est le mythe du grand homme, mais revivifié, mitonné à la sauce Royal (qui a bien appris de Mitterrand). Contrairement à certains, qui voient dans cette posture un déni des réalités et un refus coupable d'annoncer les réformes qui seront nécessaires (ce qui en mène plus d'un à la possibilité Bayrou), il me semble que le pari de cette incarnation est de faire passer la pilule de l'aggiornamento que le PS n'a pas encore totalement réalisé, mais auquel il me semble que SR souscrit plus ou moins officiellement.

Si c’est vrai, on peut objecter qu’il y avait une autre façon de s’y prendre. C’était de se positionner clairement pour la réforme, d’abord à l'intérieur même du PS pour lui faire rattraper son retard conceptuel par rapport à ses voisins européens, lui faire clarifier son rapport au libéralisme, etc. Puis c’était d’affronter le candidat de l’UMP projet contre projet, analyse contre analyse, vision contre vision. C’était, en somme, ce que que dit, a posteriori (ce qui fait quand même une différence), Eric Besson : accepter le réformisme de gauche, le proposer aux Français, se battre pour qu’il triomphe.

Cette méthode n’a pas été suivie ; je pense que c’est dommage. Peut-être l’histoire donnera-t-elle raison à Ségolène Royal. Peut-être la « reine thaumaturge » parviendra-t-elle, si elle est élue, à guérir la France de ses maux, à faire passer les ajustements nécessaires qu'impliquent les mutations du capitalisme sans nous en imposer la douleur de la prise de conscience. Peut-être. Mais, étant de nature assez sceptique à l'endroit des apprentis sauveurs, j'ai le droit de demander pour voir avant de voter.

1 J'assume le côté totalement anachronique de la comparaison avec Hugues Capet, où le "peuple" ne constitue qu'une projection a posteriori
2 J'en poursuivrai l'analyse sous peu, mais ça prend plus de temps que prévu, ces choses-là

lundi 19 février 2007

L'analyse du discours de Villepinte (1) : où l'on apprend que Ségolène a un programme, du courage, et un diagnostic économique

Je reprends où j'en étais resté hier, et je me lance dans l'analyse du discours. Et première surprise : Ségo commence plein pot sur la dette, et sur un diagnostic économique auquel je souscris entièrement : croissance de la dette et du déficit des comptes sociaux, mauvaise spécilisation de l'appareil productif, déficit du commerce extérieur (ça, en revanche, c'est pas si grave, je ferai un billet dessus un jour), atonie de l'investissement productif. Placer l'entière responsabilité de cet état de fait sur la droite n'est pas très sport, mais ne rêvons pas, on est en campagne électorale, pas au coin du feu chez mémé, et, alors que la France allait plutôt mieux que ses voisins sous Jospin, c'est l'inverse maintenant.

Ce diagnostic est ponctué par des références répétées et soutenues aux PME, à l'innovation, à l'inventivité. Par exemple : « nous sommes un pays d'excellence technologique où pas un jour ne passe sans que les hommes et les femmes se lancent pour donner corps à un projet créateur d'activité, de valeur, et d'emploi. Je suis reconnaissante à ces enterpreneurs du risque qu'ils prennent et qui permet de créer, chaque année, les emplois que la mondialisation financière déplace ». Ou encore : « nous sommes la cinquième puissance économique mondiale. Nous devons ce rang au travail des Français qui innovent, prennent des risques, et travaillent dur ». Décoiffant, non, cet hymne à la puissance économique, dans la bouche d'un candidat socialiste ? En tout cas, commencer par ce thème absolument pas fédérateur alors qu'elle jouait gros sur ce meeting, c'est assez bluffant : elle aurait éructé "le SMIC à 1500 € tout de suite et à bas les patrons voyous" que la salle aurait été en transe de suite. Elle ne l'a pas fait.

On remarque en passant la construction d'un modèle et d'un anti-modèle : le bon entrepreneur, appartenant à une petite entreprise innovante (s'il habitait dans le Poitou, ça serait encore mieux), et qui créé de l'emploi, contre la « mondialisation financière » qui « déplace » les emplois créés par les bons. Comprendre : vous travaillez, ils viennent et pillent (« entendez-vous, dans les campagnes, mugir ces féroces soldats ! Ils viennent jusque dans vos bras, égorgez vos filles et vos compagnes, et vous volez les emplois que vous avez créés »). Cela dit, moquer de ce manichéisme est assez facile, mais point trop n'en faut : la dimension morale du travail est une des bases de l'identité socialiste, et c'est émminement respectable.

Toujours dans le côté novateur, cette critique de l'inefficacité de l'Etat : « nous avons un Etat qui est devenu beaucoup trop lourd (...) il faut en finir avec cette lourdeur de l'Etat central qui engendre toujours plus de textes législatifs ou réglementaires – et des textes qui, bien souvent, sont à la fois illisibles et inutiles ». C'est même un peu gonflé, sachant que Ségo a inscrit au nombre de ses 100 propositions un certains nombre de doublons législatifs (obésité, violences faites aux femmes) ou réglementaires (indices de prix diversifiés). Mais quand même, la réforme de l'Etat est par nature impopulaire, puisque cela signifie qu'il faut augmenter la productivité d'icelui, et là, rien n'est dit sur le comment de la chose (des esprits persifleurs pourraient faire remarquer qu'on devrait y arriver en ne remplaçant pas un fonctionnaire sur deux, mais rassurez-vous, ils n'ont pas droit de cité ici). Perso, je trouve ça très bien, et je pense qu'on peut réformer l'Etat tout en conservant un ratio sphère public / sphère privée similaire : c'est le choix social-démocrate, comme je l'exprimai dans ce précédent billet.

Girondine, personne ne peut plus suspecter Ségolène Royal de ne pas l'être. « Et tant pis pour ce vieux jacobinisme qui est l'un des démons les plus malins de ce pays » : Chevènement appréciera... On peut n'y voir que posture électorale (la province contre Paris), mais je ne crois pas : à gauche, le culte de l'Etat est suffisamment fort pour que la proposition d'une nouvelle vague de décentralisation puisse constituer un pari sans risque. C'est donc qu'elle y tient. Brissot, tu es vengé !

On ne parle plus du « syndicalisme de masse » que Ségo avait appelé de ses voeux lors de la fête de la Rose (lien), mais le dialogue social est mentionné : « créer ce vrai dialogue social qui reste, en France, terriblement archaïque » ou bien « je m'engage à tout faire pour qu'un nouvel essor soit donné à la démocratie sociale et au dialogue social constructif qui va avec ». Il me semble que ce problème est LE problème principal : nous avons le taux de syndicalisation le plus bas de l'OCDE, et encore : le public relève le niveau. Or c'est dans le privé, là où est l'argent, là où se font les profits, qu'il est primordial de discuter, de partager, de construire. Je ne peux donc qu'applaudire frénétiquement à cette proposition.

Last but not least, le rôle dévolu à l'innovation et à la recherche. Tout d'abord, il y les chiffres : orienter les aides aux enterprises vers la recherche, augmenter le budget de la recherche de 10 % par an, mesures fiscales visant « encourager les enterprises à innover et à faciliter leur accès au financement bancaire » (on remarque que, de financement boursier, nulle trace, alors qu'on est dans un économie de plus en plus désintermédiée, mais bon). En tout cas, voilà l'ersatz d'une politique de l'offre, supply-side comme on dit outre-atrlantique. C'est bien : dans toutes les nouvelles théories de la croissance, on distingue bien les politiques de demande (mesures de relance, politiques conjoncturelles), qui visent à rapprocher la croissance de son niveau tendanciel, des politiques de l'offre (mesures d'allocation, structurelles), qui influent sur le niveau tendanciel de la croissace. Et là, pour une fois, on a une politique de l'offre. Oh certes, pas surdimmensionnée, pas démesurée, timide. Mais elle est là quand même. Pour votre serviteur, ce soir, c'est la bonne nouvelle de la campagne.

Voilà pour le côté positif. Mais Ségo peut aussi passer du côté obscur : demain !

dimanche 18 février 2007

Le discours de Villepinte : les termes du débat

Ségolène, incarnation du socialisme keynéso-révolutionnaire à la française, ou figure de proue de la sociale-démocratie et du socialisme réformiste ? Cela fait une semaine que je lis et relis le discours de Villepinte, et je n'ai toujours pas tranché. En fait, cette confusion est probablement voulue : Ségolène en tant que synthèse des deux grandes tendances du socialisme français, comme naguère Mitterand fut l'homme qui montra que la gauche avait la crédibilité requise pour gouverner, c'est probablement l'image que Villepinte voulait ancrer dans les esprits. Si l'on part du postulat (arbitraire, mais peut-être assez adapté) que pour gagner il faut 1/ un socle électoral large et stable 2/ une stature de présidentiable 3/ de l'originalité, ou quelque chose qui fasse la différence, disons que Ségolène avait le 3/ (c'est comme ça qu'elle a gagné la primaire, par son discours novateur, sa distance affichée par rapport à la doctrine) et l'a gardé (débat participatif, perception (érronée) dans l'opinion comme une personnalité hors du sérail de la vie politique parisienne, etc.), et que l'objectif de sa campagne, c'est de solidifier le 1/ et d'acquérir le 2/. J'interprète son discours comme participant d'un effort de présidentiabilisation de la candidate (capacité à traiter les grands enjeux, positionnement sur la question de la dette, etc.), et ses propositions comme un socle pour rassembler son camp et, au-delà, toute la gauche.

Voilà pour la technique électorale. Mais la question qui m'intéresse davantage, c'est celle de la doctrine. Pour résumer, je vois que PS comme traversé par deux courants assez antagonistes : il y a un courant réformateur, 2ème gauche, social-démocrate, mendésiste, rocardien, pro-européen (au sens de la construction actuelle de l'Europe, s'entend, sinon je vais me faire taper dessus par les nonistes), etc. Face à cela se dresse un autre courant plutôt anti-libéral, voyant le socialisme comme une rupture par rapport au modèle économique capitaliste (et pas seulement comme une régulation, même convaincante, de ce dernier), plutôt 1ère gauche, n'ayant jamais fait véritablement son deuil de l'économie dirigée, protectioniste, mitterandien d'un point de vue économique. Grosso modo, le 1er courant constitue la base de DSK, le second celle de Fabius. Et puis il y a un centre qui « défend » un certain nombre de points durs, les fondamentaux de l'identité socialiste : la laïcité, la défense de l'enseignement public, l'attachement à la notion de service public à la française, etc.. La particularité du PS, c'est que sa ligne officielle semble généralement résulter d'une alliance entre le centre et la 1ère gauche, autour d'une rhétorique emprunte de nostalgie révolutionnaire, de stigmatisation du « clivage droite-gauche », etc., tandis que sa pratique du pouvoir s'apparente plutôt à la sociale-démocratie, et fonctionne comme une alliance entre la droite du parti et son centre. Cette pratique n'est en fait que rarement assumée dans le discours : quand elle l'est, on hurle à la traitrise par rapport aux idéaux, à la compromission face au marché (voir les réactions au « l'Etat ne peut pas tout » de Jospin). Pourquoi ? Parce que figure également dans les fondamentaux de l'identité socialiste – et donc dans l'héritage que défend le centre du PS – une appétence révolutionnaire, l'idée que, dans le fond, c'est la révolution qu'on poursuit, et pas n'importe quelle révolution, la Révolution avec un grand R, la glorieuse Révolution de 1789, toujours en cours, jamais achevée. Du coup, le PS (sous la pression de l'autre gauche, qu'on appelle aujourd'hui poétiquement la « gauche de la gauche ») demande à son leader de faire allégeance à cette rhétorique, ce qui aboutit au comportement schyzofrène précédemment décrit. Pour avoir tenté de s'affranchir de cette règle, Lionel Jospin a perdu la présidentielle. Pour avoir voulu réaliser l'alliance de la gauche du PS et de son centre autout d'un discours social-démocrate assumé, Michel Rocard a toujours fait figure de traître en puissance, et le PS lui a préféré Miterrand, qui, lui, a parfaitement joué de cette dualité, pour s'imposer en 1981 sur la base d'un discours qui n'eut finalement que peu de rapport avec la pratique qui faut régularisée dès le « tournant » de 1983.

Ce qui m'intéresse dans la candidature de Ségolène, c'est de savoir comment elle va gérer cette dualité. Il y a plusieurs indices pour dire que Ségolène Royal est parfaitement consciente de ce problème. Pour moi, elle est intellectuellement dans le « camp » de la 2ème gauche : elle est réformiste, pas révolutionnaire ; sociale-démocrate plutôt que néo-marxiste ; girondine plutôt que jacobine. Elle a « pris » le PS en refusant de s'inscrire par rapport ligne de clivage, et bien le lui en a pris : elle a su fédérer toutes les tendances en alliant un bref hommage à Blair (2ème gauche) et une dénonciation des délocalisation (1ère gauche), surtout, elle a fait de sa différence un atout pour laisser dans l'oubliette ce fameux clivage qui empoisonne le PS depuis tant d'années.

Fort bien. Mais ce que je veux savoir, c'est si, dans sa campagne, SR va tenir un discours de première gauche pour gouverner en tant que sociale-démocrate, ou si elle assumera le discours réformateur. Parce que, l'effet de mode passé, on s'aperçoit bien que la nouveauté qu'elle semblait incarner ne joue plus, ou en tout cas pas assez pour la faire gagner : il faut trouver autre chose, et on sent bien depuis la semaine dernière qu'on s'oriente vers une campagne plus classique. Or qui dit campagne classique dit programme économique, propositions détaillée, etc. Il va donc falloir choisir. Et les termes de l'alternative sont simples : soit le discours habituel, avec possibilité de rassembler autour d'un clivage droite-gauche assumé, soit assumer le discours réformateur, ce qui dit problèmes pour faire le plein dans son propre camp, mais une ouverture au centre plus facile pour le second tour. Vous l'aurez compris, votre serviteur a déjà choisi : c'est un discours réformateur assumé qui procurera à la candidate socialiste le mandat pour gouverner le plus fort, car pouvant êter suivi d'effet. Sinon, SR prendrait un risque très important : celui de gagner. Or que pourrait-elle construire sur le socle d'une telle victoire à la Pyrrhus ?

Voilà donc, ô lecteur qui a lu jusqu'ici, la problématique autour de laquelle le discours de Villepinte de SR doit être évalué. On s'y colle ?

vendredi 16 février 2007

Coming soon

Je forme une entreprise qui n'eut jamais d'exemple et dont l'exécution n'aura point d'imitateur.
Je veux montrer à mes semblables un programme présidentiel dans toute la vérité de la nature ; et ce programme ce sera celui de Ségolène.
Lui seul. Je sens son cœur et je connais les programmes présidentiels. Il n’est fait comme aucun de ceux que j'ai vus ; il ose croire n'être fait comme aucun de ceux qui existent. S’il ne vaut pas mieux, au moins il est autre. Si la nature a bien ou mal fait de briser le moule dans lequel elle l'a jeté, c'est ce dont on ne peut juger qu'après l'avoir lu.
Que la trompette du Premier tour sonne quand elle voudra, je viendrai, les 100 propositions de Ségolène Royal à la main, me présenter devant le souverain isoloir. Je dirai hautement : " Voilà ce que j'ai fait pour les comprendre, ce que j'ai pensé en les lisant, ce que je fus en les commentant. J'ai dit le bien et le mal à leur sujet avec la même franchise. Je n'ai rien tu de mauvais, rien ajouté de bon, et s'il m'est arrivé d'employer quelque ornement indifférent, ce n'a jamais été que pour remplir un vide occasionné par mon défaut de mémoire ; j'ai pu supposer crédible ce que je savais avoir pu l'être, jamais ce que je savais être faux. J’ai montré les 100 propositions telles qu’elles furent ; méprisables et viles quand elle l'ont été, bonnes, généreuses, sublimes, quand elles l'ont été : j'ai dévoilé leur intérieur tel que tu l'as vu toi-même. Etre éternel, rassemble autour de moi l'innombrable foule de mes semblables bloggeurs ; qu'ils écoutent mes confessions, qu'ils gémissent de mes indignités, qu'ils rougissent de mes misères. Que chacun d'eux découvre à son tour son cœur aux pieds de ton trône avec la même sincérité ; et puis qu'un seul te dise, s'il l'ose : " Je fus meilleur lecteur des 100 propositions de Ségolène Royal que cet homme-là. "

Première salve demain !

PS : merci Jean-Jacques